Comment l’inflammation de bas grade entretient le surpoids et l’obésité

Comment l’inflammation de bas grade entretient le surpoids et l’obésité

Une des découvertes majeures de ces dernières années dans le domaine de l’obésité est l’identification de son caractère inflammatoire au niveau du tissu adipeux [7] [8]. En effet, des macrophages, cellules clés de l’inflammation, sont attirés dans le tissu adipeux comme s’il était un corps étranger. Ils s’accumulent autour des adipocytes et s’activent en libérant des molécules de signalisation pro-inflammatoires [9]. Il semblerait que ces cellules immunitaires soient conduites dans le tissu adipeux pour différentes raisons :  

  • La présence d’antigènes au niveau intestinal : une perméabilité intestinale chronique, souvent liée à une dysbiose du microbiote [10], ou à des intolérances alimentaires ignorées, peut amener des antigènes bactériens tels que les LPS (lipopolysaccharide) dans la circulation sanguine. Ceux-ci se retrouvent captés par les récepteurs PRR (pattern recognition receptors) des adipocytes. En résulte le déclenchement d’une réaction inflammatoire chronique au niveau du tissu qui s’installe tant que l’imperméabilité intestinale n’est pas restaurée [11] [12].
  • Une augmentation des niveaux de composés alimentaires et autres métabolites tels que les acides gras libres peuvent engendrer une inflammation via l’activation de ces mêmes récepteurs PRR (pattern recognition receptors) des adipocytes. L’activation engendre une inflammation qui s’installe tant que le régime n’est pas rééquilibré [13].
  • Une balance énergétique positive soutenue occasionne un stockage accru des graisses. L’hypertrophie et hyperplasie des cellules adipeuses (du tissu adipeux blanc) qui en résulte, aboutit à un remodelage du tissu. Cette réorganisation tissulaire cause un stress et un manque d'oxygénation de certains adipocytes qui induit une fibrose et une nécrose des cellules. Les cellules mortes induisent le recrutement de cellules immunitaires (macrophages, lymphocytes, mastocytes), et le déclenchement d'une réaction inflammatoire avec la sécrétion de cytokines [14].

figure 2 - les causes potentielles de l’inflammation du tissu adipeux  [14]

Comment l’inflammation de bas grade entretient le surpoids et l’obésité ?

Le surpoids est donc une maladie inflammatoire qui peut engendrer l’obésité en raison de l’instauration de cette inflammation systémique du tissu adipeux. Le développement du tissu adipeux en cas d’obésité s’accompagne d’une augmentation de la production de cytokines pro-inflammatoires telles que l’interleukine 6 (IL-6), le TNF-α mais aussi la leptine [15] [16]. En revanche, l’adiponectine aux propriétés anti-inflammatoires voit sa production diminuer en cas d’obésité [17].

Cet état inflammatoire, lorsqu’il persiste, mène peu à peu à des complications comme le diabète ou des maladies cardiovasculaires. En effet, l’inflammation favorise le dépôt et l’oxydation de lipides dans les artères donc augmente le risque d’accident cardiovasculaire.

De plus, l’inflammation, notamment par l’interleukine 6, réduit la sensibilité des récepteurs à l’insuline, qui ne répondent plus correctement à l’insuline : on parle d’insulino-résistance, facteur clé dans le développement du diabète de type 2 et dans la prise de poids [18] [19].

L’inflammation à bas bruit est un levier pour la croissance du tissu adipeux, notamment au niveau abdominal. Cette graisse est elle-même productrice de messagers pro-inflammatoires, qui entretiennent le cercle vicieux : le surpoids s’auto-entretient à travers l’inflammation [20].

Figure 3 - Inflammation et obésité : un cercle vicieux

Dans une étude récente chez des enfants et des adolescents, il a clairement été montré que ceux qui étaient le plus en surpoids avaient l’inflammation la plus marquée (CRP élevée). De plus, les jeunes en surpoids qui avaient la CRP la moins élevée, sont ceux qui ont pu le plus facilement retrouver un poids normal. Les auteurs ont conclu que l’inflammation de bas grade réduit la capacité à maigrir et surtout favorise la survenue d’un syndrome métabolique (surpoids, résistance à l'insuline, cholestérol, hypertension)  [21].

Apprenez-en plus sur les analyses biologiques à entreprendre dans le cadre d'une inflammation de bas grade liée au surpoids.

Références bibliographiques

[7] The complex immunological and inflammatory network of adipose tissue in obesity; Vasso Apostolopoulos, Maximilian P J de Courten, Lily Stojanovska, Gregory L Blatch, Kathy Tangalakis, Barbora de Courten; 2016 Jan; https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/26331761/

[8] Role of immune cells in obesity induced low grade inflammation and insulin resistance; Ambreen Asghar, Nadeem Sheikh; 2017 May; https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/28285710/

[9] Cellular and molecular players in adipose tissue inflammation in the development of obesity-induced insulin resistance; Byung-Cheol Lee, Jongsoon Lee; 2014 Mar; https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/23707515/

[10] Intestinal permeability regulation by tight junction: implication on inflammatory bowel diseases; Sung Hee Lee; 2015 Jan; https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/25691839/

[11] Microbiote intestinal (flore intestinale); Une piste sérieuse pour comprendre l’origine de nombreuses maladies / Inserm / 18/10/2021; https://www.inserm.fr/dossier/microbiote-intestinal-flore-intestinale/

[12] Gut Microbiota as a Trigger for Metabolic Inflammation in Obesity and Type 2 Diabetes; Torsten P M Scheithauer, Elena Rampanelli, Max Nieuwdorp, Bruce A Vallance, C Bruce Verchere , Daniël H van Raalte , Hilde Herrema; 2020 Oct 16; https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/33178196/

[13] Obesity and inflammation, 2018 Sep 1; Jacek Karczewski, Ewelina Śledzińska, Alina Baturo, Izabela Jończyk, Aleksander Maleszko, Paweł Samborski, Beata Begier-Krasińska, Agnieszka Dobrowolska; https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/30547890/

[14] Obesity and inflammation, 2018 Sep 1; Jacek Karczewski, Ewelina Śledzińska, Alina Baturo, Izabela Jończyk, Aleksander Maleszko, Paweł Samborski, Beata Begier-Krasińska, Agnieszka Dobrowolska; https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/30547890/

Figure 2 - les causes potentielles de l inflammation du tissu adipeux

[15] Inflammation and obesity (lipoinflammation); Olatz Izaola, Daniel de Luis, Ignacio Sajoux, Joan Carles Domingo, Montse Vidal; https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/26040339/

[16] Macrophages, Low-Grade Inflammation, Insulin Resistance and Hyperinsulinemia: A Mutual Ambiguous Relationship in the Development of Metabolic Diseases; Gerhard Paul Püschel, Julia Klauder, Janin Henkel; 2022 Jul 27; https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/35955975/

[17] Multifaceted Physiological Roles of Adiponectin in Inflammation and Diseases; Hyung Muk Choi, Hari Madhuri Doss, Kyoung Soo Kim; 2020 Feb 12; https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/32059381/

[18] Role of Interleukin-6 in Development of Insulin Resistance and Type 2 Diabetes Mellitus; Kanwal Rehman 1, Muhammad Sajid Hamid Akash 2, Aamira Liaqat 3, Shagufta Kamal 4, Muhammad Imran Qadir 5, Akhtar Rasul 6; 2017; https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/29199608/

[19] IL-6 signalling pathways and the development of type 2 diabetes; Mohamad Akbari, Vahideh Hassan-Zadeh; 2018 Jun; https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/29508109/

[20] Adipose tissue inflammation and metabolic dysfunction in obesity; Tatsuo Kawai, Michael V Autieri, Rosario Scalia; 2021 Mar 1; https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/33356944/

Figure 3 - Inflammation et obésité : un cercle vicieux ; www.pensersante.fr/inflammation-obesite

[21] High-Sensitivity C-Reactive Protein and Leptin Levels Related to Body Mass Index Changes Throughout Childhood; Pilar Navarro, Olaya de Dios, Teresa Gavela-Pérez, Asha Jois, Carmen Garcés, Leandro Soriano-Guillén; 2016 Nov; https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/27587073/